LA SLA ET LE CANNABIS À USAGE MÉDICAL PAR LE PR. CLAUDE DESNUELLE

22 avril 2021
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Un décret du Ministère des Solidarités et de la Santé publié fin mars 2021, officialise la mise en place de l’expérimentation de l’usage médical du cannabis en France prévue à article 43 de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 et selon les conditions précisées par le décret du 7 octobre 2020. Le but est d’évaluer le dispositif d’accès au cannabis médical et non l’efficacité du cannabis médical même si des premières données cliniques françaises seront collectées.

Quelles sont les situations concernées ?

L’Agence Nationale de Sécurité du médicament (ANSM), chargée de la mise en œuvre, publie une liste dans laquelle, sans être exhaustif, certaines situations peuvent se rencontrer chez les personnes atteintes de SLA : douleurs neuropathiques réfractaires aux thérapies (médicamenteuses ou non) accessibles ; situations palliatives, ou spasticité douloureuse liée à une pathologie du système nerveux central. On peut donc considérer que si l’une de ces conditions justifie d’une prescription médicale chez une personne atteinte de SLA, cette personne peut bénéficier de l’expérimentation mise en place à condition de respecter les procédures de prescriptions et d’utilisation, et les produits utilisables.

Qu’est-ce que le cannabis médical ?

Le terme de cannabis est un terme générique qui recouvre des plantes très différentes par leur composition contenant de nombreuses molécules différentes, dont certaines, seules ou associées, ont des vertus thérapeutiques. De fait, quand on parle de cannabis on désigne dans la famille des cannabinoïdes de son principal constituant psychoactif le delta-9-THC (THC), et essentiellement du cannabidiol (CBD) et du cannabinol (CBN).

De nombreuses données suggèrent que le système cannabinoïde est impliqué dans la modulation de la douleur via l’activation de récepteurs principalement localisés au niveau du système nerveux central et au niveau des neurones afférents primaires et de la moelle épinière. Ce sont des neuromodulateurs modifiant l’effet de la transmission de neuromédiateurs comme le glutamate, le GABA, la glycine, la noradrénaline, la sérotonine, l’acétylcholine et de nombreux neuropeptides. Leur activation permet une modulation de la transmission synaptique des voies sensitives de la douleur. Ils sont aussi actifs sur l’hypertonie musculaire de la spasticité en modulant les afférences excitatrices.

Lorsque l’on parle cannabis médical (terme plus adapté que cannabis thérapeutique), on parle d’une association de molécules dans une indication précise. On fabrique des médicaments très différents les uns des autres par leur composition. Le cannabis médical répond à des standards pharmaceutiques, il est prescrit par des médecins et délivré par des pharmaciens. On parle de produits qui ont des niveaux de preuve d’efficacité thérapeutique suffisante et qui relèvent de la classe des stupéfiants comme la morphine.

Les médicaments à base de cannabis utilisés pendant l’expérimentation sont produits à cet effet par des fournisseurs sélectionnés par l’ANSM et soumis à des contrôles. Ils contiennent du THC et du CBD dosés selon des concentrations définies pour l’expérimentation. Ces médicaments sont donc différents des préparations de CBD seul, produites sans contrôle, proposées à la vente sur internet. Ils peuvent se présenter sous l’une des 3 formes suivantes : pour inhalation par vaporisation, pour prise orale en capsule ou équivalent et pour prise orale sublinguale. Ce sont donc des produits bien différents de ceux qu’on trouve à la vente postionnés dans un créneau économique de « cannabis bien-être » voire de « cannabis récréatif » qui contiendraient majoritairement du CBD et qui ne peuvent pas être commercialisés en France sauf s’ils sont d’origine purement synthétique.

En pratique

Une liste des centres habilités à prescription est donnée sur le site de l’ANSM (voir ci-dessous liste des structures de référence), il s’agit principalement de centres antidouleurs, de secteurs palliatifs et de services de neurologie appartenant à un centre hospitalier. Les médecins travaillant dans ces centres sont habilités à prescrire sur ordonnances sécurisées similaires à celles utilisées pour prescription de morphine. Une dérogation peut être délivrée par les Autorités de santé après formation spécifique.

Pr. Claude Desnuelle

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