Trouver une molécule capable de ralentir, voire stopper l’évolution de la sclérose latérale amyotrophique (SLA) est le moteur de centaines d’équipes de recherche à travers le monde.
Pourtant, entre les premiers résultats encourageants et la mise sur le marché d’un traitement, le parcours reste semé d’embûches. L’une des principales difficultés : les essais cliniques de phase 2, souvent prometteurs, mais qui échouent à confirmer leur efficacité en phase 3.
Phases 2 et 3 : quelle différence ?
Les essais cliniques se déroulent en plusieurs étapes, chacune avec des objectifs précis permettant de garantir la sécurité et l’efficacité d’un candidat médicament.
Phase 2 : cette étape vise à déterminer la dose minimale efficace, c’est-à-dire la dose la plus faible produisant un effet sans effet secondaire majeur. On y étudie aussi les premiers signaux d’efficacité thérapeutique, souvent à l’aide de marqueurs cliniques. Dans la SLA, on utilise depuis longtemps l’échelle ALSFRS-R, qui évalue les capacités fonctionnelles des patients.
Phase 3 : il s’agit de l’étape décisive. Elle évalue l’efficacité réelle du traitement sur un grand nombre de patients. Les participants sont répartis en deux groupes : l’un reçoit le candidat médicament, l’autre un placebo — tout en poursuivant le traitement de référence (généralement le riluzole, pour la SLA). Les chercheurs comparent les évolutions des deux groupes pour détecter un bénéfice significatif.
Premier défi : la complexité de la SLA
La SLA n’est pas une maladie unique, mais un ensemble de formes cliniques : sporadiques ou familiales, liées à diverses mutations génétiques (SOD1, C9orf72, etc.). Longtemps, les candidats médicaments ont été testés uniquement sur un modèle animal de SLA SOD1. Or, cette mutation concerne à peine 10 à 11 % de l’ensemble des cas. Lorsqu’on passe en phase 3 avec une population plus hétérogène, l’effet observé en phase 2 disparaît souvent.
Heureusement, les modèles précliniques se diversifient, permettant une meilleure représentativité de la maladie. Cette évolution ouvre la voie à des traitements ciblés. C’est le cas, par exemple, du Tofersen, développé spécifiquement pour les patients porteurs de la mutation SOD1.
Deuxième défi : l’urgence imposée par la maladie
Un médicament met en moyenne 15 ans à arriver sur le marché — 20 ans pour le Tofersen. Or, la SLA évolue vite, très vite. Pour les patients, chaque mois compte.
Cette tension entre rigueur scientifique et urgence vitale pousse les chercheurs à explorer des solutions comme les analyses post-hoc : on reprend les données d’un essai de phase 2 pour identifier des sous-groupes de patients chez qui le médicament semble plus efficace (par exemple : avec ou sans mutation génétique).
Mais cette stratégie comporte un risque : en phase 3, ces résultats ne se confirment pas toujours. Les patients sont plus variés, les critères plus larges, et le bénéfice attendu peut disparaître.
Que peut-on améliorer ? Les recommandations de 2025
En 2025, une équipe internationale de chercheurs (États-Unis, Royaume-Uni, Pays-Bas) a publié un article majeur dans la revue Brain Update, proposant trois pistes concrètes pour améliorer les essais de phase 2 dans la SLA :
1 – Mieux concevoir les essais de phase 2
Beaucoup d’essais durent six mois, mais certains médicaments ont besoin de plus de temps pour montrer un bénéfice. Le Tofersen, par exemple, n’a révélé un effet clinique significatif qu’au bout de 12 mois.
Autre limite : l’utilisation de l’échelle ALSFRS-R comme principal critère d’évaluation. Elle est utile, mais pas toujours suffisante en phase 2. De nouveaux biomarqueurs, comme les neurofilaments dans le sang ou le liquide céphalorachidien, pourraient permettre de détecter plus précocement une réponse biologique au traitement.
2 – Établir des règles claires pour passer ou non en phase 3
Multiplier les indicateurs (primaires, secondaires, exploratoires) dans un essai peut augmenter le risque de faux positifs lors des analyses post-hoc. Cela peut aboutir à lancer une phase 3 sur un espoir incertain. Les chercheurs proposent donc de définir dès le départ des règles de type stop/go : si tel critère est atteint, on poursuit ; sinon, on arrête.
3 – Mieux communiquer les résultats
Enfin, la communication joue un rôle crucial. Trop d’optimisme peut générer de faux espoirs, détourner des ressources, ou amener des patients à s’engager dans des programmes compassionnels qui les excluent ensuite d’essais plus prometteurs. Il est essentiel de trouver le bon ton : clair, respectueux, réaliste.
Et maintenant ?
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